L’expérience Media de demain.
Nous avons vu dans la première partie de cet article comment la notion de chaîne doit évoluer en un service applicatif qui propose une expérience d’usage sociale et conversationnelle autour du contenu. Dans la deuxième, comment la maitrise des data est primordiale pour y arriver. Et dans la troisième, comment les technologies liées à l’image, aux capteurs et aux implants ont un rôle à jouer. Nous allons dans cette quatrième imaginer l’expérience media de demain.
Si je parle ici de toutes ces technologies, ce n’est ni en technophile convaincu, ni en épouvantail voulant effrayer avec ce futur. C’est parce que ces technologies vont avoir une influence sur les contenus. On va s’en servir de plus en plus pour raconter des histoires, pour plonger le spectateur dans des expériences nouvelles.
Le media entertainment, lié aux images, va devenir pour l’homme un véhicule d’expériences sociales. Deux modalités devraient coexister et se mixer : une externe et une interne.
Le mode externe permettra une expérience pervasive. Une sorte de super transmedia qui sera collaboratif à l’extrême, dans un monde où le contenu est totalement immersif. Une expérience à vivre tout au long de sa journée, avec des objets connectés personnels et collectifs. Une expérience totale dont on a pu voir des prémices réussis via Lexis Numérique (In Memoriam et Alt Minds). Le mode interne fera la part belle aux capteurs haptiques notamment, mais aussi à des capteurs implantés dans le corps des spectateurs. L’expérience permettra de ressentir dans son corps, (et même de « voir » dans sa tête) les émotions et les images.
Projetons-nous :
nous sommes en 2027, Andrew Niccol vient de réaliser son nouveau film, Retour A Gattaca. Il a scanné en 3D ses acteurs, Amanda Seyfried et Justin Timberlake, a tourné dans des décors réels qui ont été transformés en décor de synthèse. On ne perçoit pas la différence entre ce qui a été tourné et ce qui a été synthétisé. Il a conçu et monté son film entièrement sur ordinateur, il y a rajeuni ses acteurs, leur a donné des émotions, et écrit son histoire, entièrement après coup, grâce à un logiciel qu’il vient de mettre au point.
Vous êtes chez vous, seul. Vous visionnez ce film sur votre écran mural de 4 mètres sur deux. Vous pouvez agir sur l’histoire avec une version simplifiée du logiciel de Niccol. C’est vous sur l’écran, vous avez remplacé le scan 3D d’un des acteurs par le vôtre. Ce n’est plus Amanda Seyfried ou Justin Timberlake, mais le ou la voisine du 8ème que vous avez scanné(e) sans qu’il ou elle ne s’en aperçoive, grâce à un hack ingénieux dans l’ascenseur. La scène de séduction ne se passe plus dans le salon futuriste imaginé par Niccol, mais dans le vôtre que vous avez substitué dans le logiciel. Vous avez éteint l’écran et utilisez maintenant l’implant dans votre cerveau, vous ressentez toutes les émotions de votre personnage, vous voyez le film à l’intérieur de votre tête. Vous le vivez.
Il est 23h. Vous êtes rentré(e) fatigué(e) du bureau, avec une collègue, le scénario du film est simplifié, votre rôle est magnifié, vous pouvez vivre une expérience passive mais riche dans un contexte rendu actif, un contexte qui intègre tous les évènements de votre journée. Vous ressentez non seulement physiquement les émotions du personnage, mais aussi celle de votre amie avec qui vous vivez maintenant le film de concert.
C’est déjà demain, vous vivez dans la réalité avec les pouvoirs que vous avez dans vos rêves !
Notes, quelques références intéressantes :
Littérature science fiction : le mouvement cyber punk ; Neal Stephenson, William Gibson, Bruce Sterling, Greg Egan ,…
Cinéma : Total Recall, Bladerunner, Existenz, Strange days,…